+Lundi 18 novembre 2024
Dongi Village / Sorowako – Soleil – 30°
Ok, ce matin, ça ne rigole pas. Papa Aldi a décidé de créer une nouvelle pièce à l’arrière de la maison et pas besoin de déclaration de travaux. Simon est donc réquisitionné pour placer des poteaux et mettre en place la tôle ondulée qui servira de toit. Pour les autres, c’est désherbage de l’avant du jardin pour donner de l’espace aux plants de cassava et d’aubergines. Nous avons démarré notre chantier un peu tard et c’est dégoulinants et assoiffés que nous arrêtons vers 11h30 notre boulot.
En tout début d’après-midi, nous décidons d’aller travailler le CNED dans un café où la connexion Wifi sera bonne. A la maison, impossible d’envoyer correctement les devoirs. Les enfants sont contents d’avoir enfin un réseau qui fonctionne bien et sont au taquet. Ils avancent super bien conscients qu’ils ont du retard à rattraper après nos deux journées de repos.
A 16h, c’est le cours d’anglais. Apolline propose d’apprendre une chanson aux enfants. Nous optons pour « le lion est mort ce soir ». Fastoche pour la guitare, fastoche pour les paroles, fastoche pour la mélodie. On cartonne ! Les 16 enfants sont à fond. Nous leur apprenons rapidement la chanson ainsi qu’un simili de chorégraphie improvisée à l’arrache. Nino nous prête ses compétences en mime pour guider les enfants tandis qu’Apolline s’empare de la guitare et moi du Ukulele. A la fin de la séance, nous convions les parents à assister au « spectacle ». Tout le monde est ravi et nous, on est crevés mais la journée n’est pas terminée. Après le cours d’anglais, Mama Aldi donne un cours de danse traditionnelle. Nous apprenons donc les quelques pas de base d’une danse typique indonésienne mais abandonnons vite car nous manquons de précision. Simon aussi est rincé. Il a continué à travailler sur la construction de la pièce supplémentaire toute l’après-midi. Après cette journée bien remplie, nous partons nous coucher dès la fin du repas sans demander notre reste.
Mardi 19 novembre 2024
Dongi Village / Sorowako – Soleil – 30°
Ce matin, comme hier, c’est jardinage pour Nino, Apolline et moi. Nous devons nettoyer une parcelle du terrain pour y planter de la cassava. Ok, du jardinage, super ! On est chauds ! Et c’est parti pour transpirer au profit du jardin potager.
Malheureusement, notre enthousiasme est rapidement mis à mal. L’espace que nous devons désherber est en fait leur ancienne décharge, c’est-à-dire l’endroit où ils balancent toutes leurs poubelles : déchets organiques, plastiques, cartons, verre… Il s’agit donc plutôt de « démerder » que de désherber. Ce sont des centaines de déchets plastiques que nous retirons de la « terre ». Le terme « terre » est d’ailleurs un bien grand mot car, sous les déchets plastiques, se trouvent d’autres déchets plastiques, et encore du plastique et toujours du plastique. Cela n’en finit pas. Comment planter quelque chose dans ce sol bourré de pétrole ? Mais la nature est bien faite et la cassava n’a quasiment pas besoin de terre pour pousser. Celle-ci permet uniquement au plant de tenir debout. Soit !
Nous travaillons ainsi pendant une heure et demi, le cœur au bord des lèvres. Une colère grandissante m’étreint. Je suis à la fois abattue, consternée et en colère. Comment une situation pareille est-elle possible ? N’ayant aucune décharge publique à proximité, les habitants n’ont pas d’autre choix que de transformer une partie de leur maison en décharge constituée de leurs propres déchets. Lorsque nous évoquons le problème avec Mama Aldi, cela ne semble pas la préoccuper plus que cela. Il s’agit simplement de leur quotidien. Ils ne connaissent rien d’autre donc ne se posent même pas la question. Ils achètent un produit, en consomment le contenu et jettent le contenant à leurs pieds, tout simplement. Comme il est loin le temps où ils emballaient leurs produits dans des feuilles de bananier. La société de consommation est passée par là et voilà le résultat !
De notre côté, nous souhaitons aider du mieux que nous pouvons mais nous n’avons pas d’autre choix que de balancer le plastique récupéré dans une autre parcelle du jardin. C’est désespérant. Que faisons-nous de notre monde ? L’homme ne mérite vraiment pas cette terre !
Nous avons donc « nettoyé », puis planté de la cassava, des aubergines et des haricots. J’ai pris le temps d’arroser les plantations et de leur parler, comme dans mon propre jardin. Espérons que mes encouragements et mes chuchotis d’amour auront un impact, infime soit-il, sur leur croissance plastifiée. C’est étonnant comme cette matinée consternante impacte fortement mon humeur. Je me sens lasse ce matin. Apolline est, comme moi, très touchée par la situation. Nino également. Je ne pense pas qu’Adam et Sam se rendent réellement compte car ils n’ont pas mis les mains dans le cambouis (au sens littéral du terme).
Pendant ce temps, Simon a bien avancé dans la construction de l’agrandissement de la maison. Ce matin, il a le temps de casser un marteau, reconstruire un four, tenir une échelle, dézinguer un tuyau d’eau, tenir des tôles et planter des clous. Pas mal en quelques heures!
Le repas du midi est toujours aussi bon. Mama Aldi est très attentive à nos goûts et, connaissant notre sensibilité aux mets trop pimentés, prépare désormais des plats en disposant le chili à côté. C’est chou !
En début d’après-midi, Simon part avec Apolline pour lui faire une formation accélérée de scooter. La jeune fille n’a jamais conduit ce genre d’engin et elle en aura probablement l’utilité dans les mois à venir durant son parcours en Asie. Elle se débrouille comme une cheffe et apprivoise le scooter très rapidement. Il faudra moi aussi que je refasse un essai un de ces jours, histoire de pouvoir ajouter une corde à mon arc. Cela ne me servira peut-être jamais mais qui sait. Les enfants, de leur côté, ont un RV visio avec Papou et Mamou pour le CNED.
Notre cours d’anglais de la journée est un peu fastidieux. Après le carton de la veille, nous avons un peu de mal à trouver l’énergie. On commence par leur faire écrire du vocabulaire puis, conscients qu’on commence à perdre les élèves, on décide de faire des jeux. Bien plus efficace !
En fin de journée, Simon emmène les garçons faire du freesby (norvégien) sur la place du village. S’ils commencent à jouer tous les trois, ils sont vite rejoints par tout un tas d’enfants qui sont ravis de jouer avec eux.
Soirée tranquille à papoter et à refaire le monde (si seulement…).
Mercredi 20 novembre 2024
Dongi Village / Sorowako – Soleil – 30°
Super programme ce matin ! Motivés par notre expérience de la veille, nous avons décidé de construire un vrai composteur à Mama Aldi afin qu’elle puisse à minima recycler ses déchets organiques et produire de l’engrais pour ses plastico-plantes. Nino, Apolline et moi nous mettons donc à l’ouvrage. On creuse deux grands trous dans lesquels on met des morceaux de cœur de palmiers pourris, de vieilles branches, des feuilles mortes et de la terre. Puis on commence la construction de la clôture autour du trou à compost qui permettra d’une part de maintenir le terreau en place et d’autre part de le protéger des poules voraces. On a vraiment la sensation de faire quelque chose de réellement utile pour l’organisation future de la maison. Cela nous fait beaucoup de bien intérieurement. Mama Aldi continuera à jeter les sacs poubelles dans le fossé de son jardin mais, au moins, elle aura prochainement de la vraie bonne terre pour produire de meilleurs légumes. Step by step !
De son côté, Simon est heureux : après nous avoir filé un coup de main pour le composteur, il fait à présent du béton pour couler la dalle de la nouvelle pièce. Comme il est agréable de le regarder dégouliner de sueur au rythme des pelletées de sable et de ciment. Il voulait bosser, il est servi ! Il a tellement d’énergie à revendre qu’il s’est réveillé à 6h ce matin pour aller courir et nager dans le lac avant de wwoofer ! Quel homme !
Il fait très chaud aujourd’hui et tous les gestes nous coûtent. Depuis quelques jours, nous sommes tellement fatigués le soir venu (par les travaux, la chaleur, les cours d’anglais et les moustiques) que nous n’entendons même plus le chant du Muslim à 4h du matin !! Avec Samuel, nous démarrons la lecture du livre de Zola « Au bonheur des dames ». Les 30 premières pages sont tellement soporifiques que nous laissons vite tomber. Pas bien !
Jeudi 21 novembre 2024
Dongi Village / Sorowako – Soleil – 30°
Gros boulot de Wwoof ce matin. Mama Aldi nous demande d’aller désherber son ancienne bananeraie qui n’a pas été entretenue depuis plusieurs mois. Nous travaillons 1h30 sous le soleil. Simon, notre gentil acharné, s’acharne. Il se prend pour Indiana Jones et coupe coupe avec le coupe coupe. Son efficacité est redoutable et dans le laps de temps de 90 minutes, nous effectuons la moitié du job attendu. Il fait à présent trop chaud pour poursuivre notre tâche. Nous reviendrons demain. En rentrant à la maison, nous avançons sur le projet de bac à compost. Je ne me sens pas très en forme après cette matinée au soleil. La chaleur ne me réussit pas.
En début d’après-midi, nous allons au café pour avoir de la bonne Wifi et envoyer les devoirs au CNED. Bon, petit bilan au bout de 2 mois et demi : nécessaire mais contraignant.
16h : Classe d’anglais. Aujourd’hui, on fait des jeux, beaucoup plus stimulants pour les enfants qu’une leçon de vocabulaire à recopier. Ils adhèrent à toutes nos propositions. C’est un vrai bonheur de partager ces temps ensemble. Ils sont très respectueux et toujours enthousiastes. Leur grande simplicité nous amène à reconsidérer profondément notre vie de bourgeois patachons…
17h45 : Je rédige le blog dans ma chambre, assise tranquillement sur mon lit et, au loin, résonne la chanson du Muslim. On finit par se faire à la récurrence de la prière. C’est plutôt beau cette communion (imposée soit-elle) de l’ensemble d’une communauté autour d’un temps consacré à la prière et à la spiritualité. Nous devrions tous réussir à nous imposer ces temps de suspension au beau milieu d’une journée où nous allons à cent à l’heure. Un petit rappel de quelques secondes, comme une invitation à arrêter le temps et à penser plus grand… Evidemment, pas forcément en déroulant un tapis en direction de La Mecque mais en écoutant la pluie tomber, en regardant une feuille flotter au vent, en ressentant le froid au travers de ses vêtements. Bon, je prends ces exemples parce que je sais de source sûre que l’hiver fait son grand retour en Picardie avec quelques flocons en prime. Alors, autant en profiter pour laisser se suspendre le temps.
Ces 4 jours de chantier ont été à la hauteur de nos attentes de wwoofeurs. Nous avons la sensation d’avoir filé un vrai coup de main à la famille qui nous en est d’ailleurs très reconnaissante. A peine une semaine après notre arrivée, nous sommes complètement intégrés à la vie de la maison et du village. C’est bouleversant.
Nous passons la soirée à rêver avec Mama Aldi du jour où elle viendra en France, de l’organisation de son séjour pour aller faire coucou à tous les wwoofeurs français qui sont passés par le Dongi Village. Nous sommes les 121, 122, 123, 124 et 125èmes volontaires qu’ils accueillent depuis 8 ans avec une bonne part de Français. Elle devra donc prévoir au moins deux mois de visite si elle veut aller voir tout le monde. Nous lui parlons d’Amiens, de la cathédrale, des hortillonnages et de la côte picarde. Nous voyons ses yeux s’illuminer à l’évocation de tous ces endroits qui lui semblent inaccessible. Ce voyage serait le plus beau des cadeaux pour elle. Espérons qu’un jour son rêve puisse devenir réalité.
Et oui , nous ici on a bien sortie la doudoune et les grosses chaussettes !
Ah enfin un peu de sueur, de béton et d’action ! J’aimerais beaucoup rencontrer Mama Adli qui a l’air d’être un personnage haut en couleurs ! Si elle vient un jour nous visiter en Picardie je l’emmènerai découvrir les rayons de son premier concurrent.
Gros bisous à tous les cinq et bon voyage vers l’Australie ! J’ai hâte de vous voir galérer avec les serpents et les araignées, je pense que vous regretterez probablement les crottes de souris sur les matelas !